LE HOME STAGING, ÇA VAUT LE COÛT?
Source de cet article: https://www.protegez-vous.ca/Maison/home-staging
Voilà une pratique à la mode depuis peu pour mieux vendre sa maison. Mais gare à ceux qui s’improvisent professionnels…
De 20 à 90 secondes suffiraient pour qu’un acheteur potentiel se fasse une opinion quand il visite une maison. Forts de ce constat, des spécialistes de l’immobilier ont eu l’idée d’importer au Québec un concept élaboré aux États-Unis dans les années 1970: le home staging, ou «mise en valeur de propriété», selon l’Office québécois de la langue française.
Le but? Créer un effet coup de cœur dès les premiers instants afin de conclure la vente rapidement tout en obtenant le meilleur prix. Pour y parvenir, une règle d’or: désencombrer les pièces pour créer une impression d’espace.
«Créer une ambiance»
L’encombrement est un facteur qui nuit souvent à la présentation et à la vente d’une propriété», explique France Arcand, animatrice de l’émission Bye-Bye maison! sur Canal Vie et cofondatrice de Coup d’œil design, l’une des premières firmes québécoises de home staging.
Il s’agit par exemple de faire disparaître les objets personnels (photos, dessins, diplômes, etc.), de libérer le comptoir de la cuisine et de ranger dans l’armoire de la salle de bains produits de beauté, tubes de dentifrice et autres brosses à dents. Puis, de disposer les meubles de telle façon qu’ils occupent le moins de place possible et, le cas échéant, d’en enlever quelques-uns.
Ou encore:
- de repeindre certains murs et plafonds avec des couleurs neutres pour leur donner un aspect neuf et uniforme;
- d’enlever une moquette usée ou de poncer des planchers abîmés;
- de revoir l’éclairage pour rendre les pièces plus lumineuses;
- d’effectuer les menus travaux de bricolage qui font qu’une maison paraît bien entretenue;
- de combattre d’éventuelles mauvaises odeurs en allumant des chandelles parfumées ou en ayant pris soin de cuire un gâteau pour créer une ambiance chaleureuse…
Au besoin, on peut même louer des œuvres d’art, des tapis ou des meubles le temps de la mise en vente. L’idée est de transformer votre chez-vous en une sorte de maison témoin afin de plaire à un maximum de visiteurs.
Tout cela pour un coût relativement modique – environ 1 % de la valeur marchande de la propriété (sans compter les honoraires du spécialiste du home staging), soit 2500 $ pour une résidence de 250 000 $. «Aujourd’hui, les gens recherchent une propriété clés en main. Ils travaillent, élèvent des enfants et ne veulent pas se lancer dans des travaux de rénovation», justifie France Arcand.
Et quand les conseils ont été donnés par un véritable professionnel, ça marche, assure-t-elle: «Bien présentée, une maison se vend beaucoup plus rapidement et, à tout le moins, le vendeur récupérera son investissement. Cela dit, il ne faut pas s’attendre à en obtenir un prix plus élevé que sa valeur sur le marché.»
«Une maison qui n’a pas une belle apparence peut donner l’impression qu’il risque d’y avoir des problèmes, renchérit Unsal Ozdilek, professeur à l’Université du Québec à Montréal et spécialiste du marketing immobilier. En ce sens, le home staging est certainement un facteur de vente supplémentaire, surtout dans le contexte actuel où l’offre dépasse la demande.»
Les limites du concept
Cette nouvelle tendance déplaît cependant à certains acheteurs potentiels. On peut espérer qu’une personne intelligente est capable de repérer d’un coup d’œil le potentiel d’un lieu sans qu’on ait besoin de dépersonnaliser son espace, écrivait récemment une internaute sur le site Internet de l’hebdomadaire culturel montréalais Voir.
«Avoir une maison propre et bien rangée au moment des visites ne suffit plus. Ce qui fait la chaleur d’un endroit devient une entrave à la transaction immobilière et on change une demeure sympathique en une coquille vide et sans âme», regrette pour sa part Andrée Proulx, jeune retraitée de la fonction publique et ex-propriétaire à Montréal. Même son de cloche du côté de l’Association professionnelle des designers d’intérieur du Québec, qui entend se dissocier d’une activité que sa porte-parole, Justine Leggett-Dubé, juge «superficielle».
Selon France Arcand, un véritable spécialiste ne doit pas confondre home staging et décoration d’intérieur. Autrement dit, il ne doit pas travailler selon vos goûts ou les siens, mais en fonction de ceux des acheteurs potentiels.
Conseils avant de signer:
- Demandez-lui s’il possède une attestation délivrée par une école ou un organisme quelconque (le Collège de l’immobilier du Québec, par exemple, offre une formation de 12 heures). Vous pouvez aussi lui réclamer un portfolio de ses réalisations, avec des «avant-après», le questionner sur ses résultats de vente, les montants qu’il a fait investir à ses clients, etc.
- Un bon professionnel utilisera autant que possible les meubles et objets déjà en place pour vous éviter toute dépense superflue.
- Avant de déménager vos meubles en trop dans un entrepôt, essayez de trouver une solution sans frais: entreposage chez des amis, dans un grenier, vente de garage, don à des œuvres de charité, etc.
- Exigez un contrat écrit dès qu’il y a des travaux impliquant des sous-traitants, ou si vous prévoyez entreposer ou louer des meubles et des objets. Dans ce dernier cas, votre conseiller devrait pouvoir vous proposer un inventaire d’accessoires en location.
- Payez plutôt par chèque; sinon, exigez une preuve de paiement.
- Vérifiez que l’entrepreneur avec lequel vous faites affaire détient une licence de la Régie du bâtiment du Québec.
Cas vécu
Autre bémol: comme le home staging n’est encadré par aucune loi et qu’il n’existe pas de formation reconnue officiellement, n’importe qui peut s’autoproclamer «expert».
Marjolaine Fournier, une lectrice de Protégez-Vous qui souhaite vendre sa maison au printemps, l’a récemment appris à ses dépens. «J’ai téléphoné à une “spécialiste” et nous nous sommes entendues sur un forfait de 375 $ pour une évaluation et des recommandations de literie, de rideaux et de couleurs. Sa visite a duré une heure. Mais en fait de recommandations, le rapport que j’ai reçu une dizaine de jours plus tard ne contenait que des généralités, avec en prime deux pages de publicités trouvées sur Internet pour des articles de décoration.»
Elle poursuit: «C’est cher payé pour une heure de visite, quelques photos et des conseils qui ne me serviront à rien! J’ai vraiment l’impression d’avoir été flouée.»
«Si la “mise en scène” de maison est intéressante pour le vendeur, l’acheteur, lui, doit redoubler de vigilance face à ce maquillage, précise Réal Coallier, directeur du bureau régional de Montréal de l’Office de la protection du consommateur. Et avant de signer une promesse d’achat, s’assurer que la transaction ne sera validée qu’après une inspection en règle d’un inspecteur en bâtiment professionnel.»